Réforme des retraites… les enseignants dans le viseur

Avec le nouveau système de retraite, “certaines professions seront lésées, et notamment les enseignants”, Emmanuel Macron reconnait ainsi l’impact de la future réforme des retraites sur les enseignants.

Rajoutant, “Le passage au nouveau système (de retraite) pour le corps enseignant ne peut aller qu’avec la transformation de la carrière… dans toutes ses composantes”. Écartant l’idée d’une revalorisation immédiate, il précise ses intentions, “Pour garder leur niveau de retraite, les enseignants devront accepter de travailler plus et de réduire leurs vacances”.

Emmanuel Macron lie donc le maintien du niveau de retraite des enseignants à une augmentation de leur temps de travail et à une diminution de la durée de leurs congés. Un terrain déjà préparé avec l’augmentation de deux heures supplémentaires du temps de travail des professeurs du secondaire et le passage de décrets prévoyant une semaine de formation obligatoire sur les congés et un réaménagement des cycles des vacances.

“La fonction professorale doit prendre un sens nouveau”…

Lors de la présentation de son budget devant la Commission de l’Éducation de l’Assemblée nationale, le 23 octobre, Jean-Michel Blanquer, précisant ses intentions sur la revalorisation du métier enseignant, ne voit, comme Emmanuel Macron, de “revalorisation” que dans une augmentation du temps travail enseignant…

Aucune revalorisation globale ne sera budgetée pour 2020 en ce qui concerne les enseignants.

“la fonction professorale doit prendre un sens nouveau. Cela passe par la capacité à personnaliser la carrière du professeur”. Autrement dit aux carrières ponctuées par un avancement statutaire succéderait une “personnalisation” de la carrière selon le “mérite”. Cela pourrait être rendu possible grâce à la loi de réforme de la fonction publique adoptée cet été qui donne de nouveaux pouvoirs à la hiérarchie immédiate. Au ministère on parle de “gestion de proximité” des relations humaines.

De curieux chiffres…

Le 3 octobre dernier, Emmanuel Macron estimait la retraite actuelle des enseignants à 1200 € par mois. Ne voulant en démordre malgré les chiffres qui lui était donnés de 2600 € en moyenne. En réalité, la retraite moyenne des enseignants partis à la retraite en 2017, chiffres du ministère, s’établissait bien à 2600 € par mois. Mais cette moyenne cache des disparités entre enseignants du premier degré et second degré. Quand les enseignants du collège et des lycées ont touché une pension moyenne de 2 850 €, ceux des écoles maternelles, primaires ont reçu une pension de 2 500 €. Un différence de près de 350 , mais une différence qui peut s’expliquer. Nombre de nouveaux retraités partent souvent avec une décote : près d’un cinquième sont dans cette situation pour les enseignants du second degré, et plus d’un tiers dans le premier degré. Ce taux important de départ avec décote dans le premier degré s’explique principalement par la possibilité de partir plus tôt pour les anciens instituteurs (57 ans en 2017), à un âge où ils n’ont pas pu cotiser les 166 trimestres nécessaires pour partir au taux plein.

… 1200 ? 2600 ? Que doit-on attendre de la “revalorisation” annoncée ?

 

Quand une soi-disant revalorisation ne cache que des économies…

Dans son rapport de 2017, reprenant celui de la cours des comptes de 2013 ( https://www.ccomptes.fr/fr/publications/gerer-les-enseignants-autrement-une-reforme-qui-reste-faire ), Gérard Longuet préconisait d’augmenter d’une heure le temps de service des enseignants. Cette mesure permettrait, selon leurs calculs, d’économiser 22 000 postes. D’autres mesures étaient aussi préconisées comme l’annualisation du temps de travail, ce qui est aussi une façon d’en augmenter automatiquement la durée puisque toutes les heures d’examen, de conseils, de formations, d’absences diverses des élèves ou du professeur, restant dues. La Cour avait aussi calculé que la bivalence dans le second degré permettrait d’économiser 2480 emplois rien qu’au collège…

Quelques chiffres:

  • En 2016, en France métropolitaine, les enseignants du privé percevaient une rémunération mensuelle nette inférieure de 15 % à celle de leurs collègues du secteur public, soit environ 350 euros de moins par mois.
  • Dans le secteur privé, selon le bilan social. En moyenne, 23% des enseignants du privé sont à temps partiel ou incomplet, contre 14% des enseignants du public.
  • Parmi les enseignants du premier degré, ceux du public partent à 59,5 ans en moyenne; ceux du privé à 59,7 ans. Les enseignants du second degré partent plus tard à la retraite : en moyenne, à l’âge de 62,4 ans.